Accueil Alphabétiquement vôtre "Mai : je m’en vais..."
"Mai : je m’en vais..."
dimanche 8 février 2004

Quelques semaines à peine après avoir donné son accord aux "Baladins de la Tradition" par l’intermédiaire de François de Kerval pour publier son article Le Supramental : une autre planète, Bernard Delafosse quittait ce monde doucement. En guise d’hommage, son ami François de Kerval a offert sa plume à Bernard Delafosse pour une lettre posthume. Toute l’équipe des "Baladins de la Tradition" se joint à lui en publiant ici les mots qu’il prête à ce grand serviteur de la Tradition.

Ce jeudi 22 Mai 2003

Cher François,

Ne m’en veuillez point si je réponds à votre lettre en ma toute nouvelle qualité de trépassé. Je l’ai bien reçue, le jour même de mon départ. Voyez-vous, ce mois de mai 2003 qui s’annonçait n’était pas pour moi. Je me suis dit : "Non, c’en est assez ! je m’en vais, moi !" Le mois de mai se voudrait joli, mais vous vous souvenez de ce que je dis souvent : "La beauté, la vraie beauté est rare tout comme la vraie noblesse d’âme."
J’étais heureux de la durée de notre amitié et de cette reprise récente de notre correspondance. Je me souviens de votre première lettre. Vous aviez lu mon livre paru aux Editions Tredaniel : "De Krisnamurti à Mère" et vous vouliez me parler d’une autre Mère, Mère Meera qui vit à Thaleim en Allemagne. Vous vous disposiez à recevoir une rebuffade de ma part et votre missive était du fait quelque peu provocatrice avec ce papier à en tête de la Société Mère Meera, branche française reprenant une phrase de Satprem : "La corne du taureau évolutif doit se saisir totalement et d’un seul coup."

Bernard Delafosse

Vous m’aviez bien l’air, vous aussi, d’un rebelle avec votre genre d’épistoles aux formules à l’emporte-pièce même si vous me dites que maintenant vous vous êtes adouci, que vous êtes moins passionné. Mais les rebelles, je les affectionne souvent. Et votre style, c’est vous. Cela aussi, je vous l’ai souvent répété, et je sais que cela vous a marqué : "Le style, c’est l’homme." Ceci s’applique tout aussi bien à moi. Je suis dans mes livres, c’est la prérogative de l’écrivain que de pouvoir se faire des amis et des disciples post-mortem. J’espère qu’on va savoir m’y rencontrer dans cette œuvre à laquelle j’ai donné tant de ma sensibilité, de mon enthousiasme, de mon imaginaire riche mais toujours contrôlé.
Remerciez de ma part M. Raymond Bernard pour sa petite phrase à mon sujet quand vous lui avez appris ma disparition qui vous attristait : " Grâce à lui, Sri Aurobindo ne sera pas oublié." a-t-il dit. C’est un honneur pour moi s’il peut en être ainsi, mais vous savez, j’y gagne car, dans ce cas, moi non plus, on ne m’oubliera pas !
Il n’y a pas de mort, mon cher François. Il n’y a que l’oubli. L’oubli du Soi, l’oubli de la grâce, l’oubli du Divin, c’est cela la mort. Là où je suis et où je poursuis un autre travail, je suis par conséquent bien plus vivant que bien des êtres incarnés dans cet âge matérialiste insatisfait.
Quant à Mère Meera, j’ai été bien loin de la rejeter, vous le savez. Elle a marqué au contraire ma recherche de Son sceau, celui du contact merveilleux d’un Avatar vivant.
J’ai été ébloui et touché par sa grâce. Pour une fois, dans votre difficile métier d’ambassadeur de la Mère Divine, vous n’aviez pas fait chou blanc et on ne vous avait pas éconduit sans ménagements. Vous en étiez tout surpris, mais mon ouverture et ma tolérance, vous avez pu le constater en me connaissant mieux, sont des points sur lesquels on ne pouvait guère me prendre en défaut.
Oui, si vous le voulez, François, vous pouvez publier sur le site des "Baladins de la Tradition" ce poème que je vous ai envoyé à propos des peintures de cet ange divin. Mais à condition que ce soit, encore une fois j’insiste là aussi : " Ne varietur ". Cela pourrait faire ma devise : " Ne Varietur ".
Ne m’avez-vous pas trouvé toujours le même après ces quelques années où nous nous étions perdus de vue. Vous étiez pris hélas dans les turbulences existentielles qui vous absorbaient entièrement. Nous sommes toujours le même que ce soit une petite note, une petite musique ou une symphonie. Pour chacun de nous, c’est la même musique, on doit simplement la jouer sur des octaves de plus en plus élevées.
Pardonnez-moi de vous avoir ainsi tiré ma révérence alors que vous projetiez de venir en juillet à Londinières en Normandie me présenter votre nouvelle femme (votre Amandine) et me parler un peu mieux de cet autre Avatar qui est entré dans votre vie par la grande porte de la consolation.
Je suis heureux de l’appréciation par votre Amandine de mon roman "Chimères bleues" qui l’a touché au cœur au point qu’elle dise qu’elle n’en a jamais lu de tel. Et puis le fait que ce roman ait opéré comme un signe de plus entre vous ne peut également que m’émouvoir. Votre attachement aux vôtres rejoint l’attitude que j’ai eue moi aussi. Un chercheur spirituel est un être incarné avec des liens charnels qui le nourrissent. Soyez heureux François.
"Mai : fais ce qu’il te plait." Mais c’est mon âme qui a choisi, je ne me suis pas vu partir. On m’a épargné la souffrance morale et physique qui appartient au vieux monde comme disait la Mère de Pondichéry. Je ne sais si on pourrait compter mon départ au nombre des dégâts collatéraux de la deuxième guerre du Golfe mais je me sentais très las de l’égrégore.
J’appelle de la sorte cette pieuvre de forces hostiles contre laquelle les Avatars et les saints mènent depuis toujours une lutte sans merci. Le livre de ma vie a tourné sa dernière page, j’ignore s’il y en aura d’autres éditions dans ce bas monde, mais ici ou ailleurs, toujours nous sommes et il y a tant et tant à apprendre, à comprendre c’est-à-dire à aimer.
Je suis fidèlement vôtre, mon cher François.

Bernard


Nous vous recommandons la consultation de quelques pages web concernant Bernard Delafosse :
 http://www.infos-dieppoises.fr
 Ses oeuvres sur le site de la Fnac
 Et bien sûr, son article sur la pensée de Sri Aurobindo Le Supramental : une autre planète sur le présent site.

D'autres pages du site à consulter sur les thèmes traités ici :

Aurobindo (Sri)
"Méditation"
Balzac et le Martinisme : Avant propos
Sri Aurobindo
Balzac et le Martinisme : Dédicaces
Limites de l’intellect - recherche unitaire
Calendrier de la Tradition : Août !
Calendrier de la Tradition : Novembre !

Bernard (Raymond)
Rencontre avec l’esprit du rocher
"La prière unit l’homme à Dieu..."
A Paris, avec Raymond Bernard
"La création est un respir de Dieu."
"HEIMARMENE - Du Mystère du Vivant aux Maîtres du Sacré"
"Raymond Bernard, un homme exceptionnel"
"HEIMARMÉNÉ" de Guy Marceau Chastrusse

Meera (Mère)
Le Supramental : une autre planète (3)
Portrait de Maïtreyi Amma
Mère Meera en France à l’automne 2007


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