Bien après lEre Védique autour du VIème siècle avant J.C, lépopée indienne du "Ramayana" ou geste de Ram a été composée en langue sanscrite par le poète Valmiki, dont on ne connaît rien historiquement. Ayana en sanscrit veut dire chemin. Cest un chemin en effet quil faut suivre à la suite de Ram, le héros de cette Histoire mirifique. Dans cette période de la première rédaction du Ramayana, lInde après une longue décadence relative connaît un réveil spirituel avec le Bouddhisme dune part et le Jaïnisme dautre part. On situe aussi dans cette période la codification des principes du Raja Yoga par Patanjali. En Occident naît le Pythagorisme, également restaurateur des Mystères de la Grèce, perdus en partie depuis Héraclite et les pré-Socratiques alors que la Chine bénéficie de la marque de Lao Tseu et du Confucianisme. Le Mahabharata contant la légende de Krishna est une autre épopée guerrière de composition légèrement antérieure. Cest un récit plus complexe et digressif mais dont le joyau central la "Bhagavad Gitâ" cest à dire "le chant du Bienheureux" est la Bible des Hindous condensant leur philosophie.
Lépopée de Ram est plus ramassée malgré ses 24000 vers en octosyllabes répartis en 7 livres. Il sen dégage, au-delà de son impact lyrique, une grâce qui étendra son rayonnement dans toute lAsie et un enseignement philosophique très cohérent et pratique quoiquil doive être interprété dans son sens ésotérique ou symbolique pour en retirer toute la sagesse quil recèle. Alors que la geste de Rama vient en Inde par les invasions Aryennes venues du nord de lInde, il existe une version du mythe Dravidienne plus de 1000 ans postérieure à celle de Valmiki. Ce chef duvre de la littérature tamoule dont lauteur est Kamban est intitulé "Iravamataram" ce qui signifie "la descente de Ram". Cest une uvre de cour royale dont les rois Chola de Tanjavore du IXème siècle furent les mécènes ayant supplanté les Rois Pallavas de Kanchipuram. On voit donc un récit Vishnouiste Aryen séduire une cour Dravidienne marquée chez ces rois bâtisseurs par le plus pur Shivaïsme ce qui ne manque pas détonner. Pendant cette époque qui sépare les deux récits, le théâtre sest développé et affiné comme art dont le Ramayana de Kamba va bénéficier.
Si le culte Vishnouiste de Krishna se répand rapidement dans toute lInde, ce nest quau XVème siècle sous le règne de lEmpereur Akbar que la dévotion populaire à Rama le concurrença sérieusement sous limpulsion du poète Tulsidas grand adorateur prosélyte du Dieu et auteur lui-même dune version du Ramayana écrit en Hindi le Shri Ramacharitmanasa ou "Lac sacré des actes de Rama". Originaire de lInde du sud, il sinstalle à Bénarès où il donne une impulsion au culte de Rama qui avait éclôt dans cette région depuis les XIème et XIIème siècles dans un élan comparable au mouvement de dévotion mariale qui saisit le Moyen Age gothique dans ce sous cycle débutant la phase finale du Kali Yuga selon René Guénon. Dailleurs Tulsidas est fortement conscient de vivre dans cet âge sombre. Sous limpulsion de Tulsidas renaît une tradition théâtrale dans lInde septentrionale qui investit la vie dun village entier pendant dix à trente jours dans le jeu du Ram Lila. On compare parfois sa mystique à celle de saint François par sa sensibilité et son sentiment dinexistence devant son Dieu. Le tulsi est une espèce de Basilic symbole de la dévotion et Das est le serviteur. Son nom serait peut-être un nom initiatique reçu dans une école Ramaïte.
Les différentes approches du mythe par les trois principaux auteurs du Ramayana sont superbement résumées par Sathya Saï Baba : "Au début du Ramayana, Valmiki fut influencé par lidée que Rama était lhomme idéal. Mais au cours de ses récits, il fut bouleversé par le sentiment que Rama était la divinité elle-même et en conclut, à la fin de lépopée, que Rama était lincarnation de la Divinité. Tulsidas, au contraire, commença son Ramayana avec la foi fermement ancrée que Rama était véritablement le Seigneur Narayana lui-même et conclura en soulignant que Rama était lhomme idéal. Kamba lauteur du Kamba Ramayan , écrivit son Ramayana mû par le sentiment que lhomme est Dieu et que Dieu est lhomme (Nara est Narayana et Narayana est Rama). Les trois grands écrivains du Ramayana y ont apporté des éclairages différents, en fonction de leurs perceptions intimes".