Le ramadan : un mois de piété dédié à la Révélation
vendredi 7 septembre 2007
par Bayazid
Il n’y a pas d’exemple, dans d’autre religions, d’un mois de jeûne suivi avec autant de rigueur par la quasi totalité des croyants. Le carême des chrétiens, destiné à préparer la vie nouvelle de Pâques, s’est adouci dans les privations, l’insistance se faisant plus forte sur la conversion intérieure. Le jeûne, comme la solitude, le silence et la prière, fait partie des pratiques de la vie monacale dans le cadre des religions ou traditions où le monachisme est vivant : il touche néanmoins une minorité.
Quel message le Coran transmet-il aux croyants du monde entier par ce mois consacré, pour des millions d’hommes et de femmes, au jeûne, à la prière, et - souvent - aux fêtes nocturnes ?
Le ramadan : en souvenir d’une Nuit où descendent les anges de l’Esprit
Le mois de Ramadan est le mois au cours duquel, en 610 de notre ère, le prophète a reçu une nuit la révélation divine par l’intermédiaire de l’ange Gabriel (Jibrîl).
Laylat al-Qadr, cette « Nuit de la Révélation », c’est La « Nuit du Destin », ou « Nuit de la Valeur », qu’on célèbre le 27ème jour du mois de Ramadan par une nuit de prière [1].
Dans le Coran, la Sourate 97 al-Qadr est consacrée à cette Nuit particulière entre toutes, dont il est dit qu’elle est « meilleure que mille mois ».
« Faites les calculs ! » nous dit le Cheikh Ahmed Abidi [2] « et vous verrez que cela fait plus de quatre-vingt trois ans. Une nuit d’adoration vaut donc mieux, pour le croyant, qu’une vie d’adoration ! Je parle d’adoration mais le terme correct est Ibadat. Son sens dépasse celui du mot adoration dans la langue française. Ibadat inclut quelque chose de spécifique au musulman dans sa relation avec Dieu : un ensemble d’attitude de respect, d’amour, de soumission, de piété ».
Ce qui est recommandé pour célébrer cette nuit, au 27ème jour du mois de ramadan, c’est ce qu’on nomme ‘Atikâf : la retraite spirituelle au cours de laquelle on pratique la prière, la lecture du Coran, et l’invocation de Dieu : le Dikhr.
Ramadan : les origines
Deux termes coraniques de la même racine sont utilisés pour désigner le jeûne : Sawm et Siyâm. Le premier terme se rapporte au jeûne d’initiative, mis en rapport avec le jeûne de Marie (Coran XIX, 16-40). Le second, le Siyâm, est le jeûne du Ramadan, un jeûne d’obligation, pilier de l’Islam.
Le terme « ramadan » peut désigner le 9ème mois du calendrier musulman (dont la date, variable, est calculé selon l’année lunaire), ou bien l’ensemble des prescriptions religieuses qui y sont associées (faire ramadan, observer le ramadan).
Le terme exprime donc une forme d’Unité qui transcende la succession temporelle des jours et des nuits, Unité que réalisa la "descente du Coran" lors de la Nuit du Destin. Durant cette Nuit, « descendent les Anges et l’Esprit, par permission de leur Seigneur » (Coran XCVII, 1-5).
C’est quelque chose de cette grâce divine que le croyant veut contempler dans son cœur, par le jeûne du ramadan.
Le jeûne du ramadan sera donc une démarche intérieure dont Dieu seul est le témoin, puisque en tant que « non-acte », abstinence, il ne peut être connu que de Lui.
Les différents niveaux du jeûne
Al Ghazali, le philosophe et soufi persan (1058-1111) a insisté sur les trois niveau du jeûne : celui du corps, de l’esprit et du cœur [3].
Le jeûne commence par l’abstention de la satisfaction des désirs élémentaires (faim, soif, pulsion sexuelle).
Ensuite, il peut être transposé aux satisfactions de l’esprit qui servent l’ego.
Enfin, il peut devenir pure abstention, totale disponibilité d’une âme absente à ce qui est autre que Dieu.
Mais comment, pratiquement, atteindre cette totale disponibilité à Dieu ?
Il y a d’abord la maîtrise du regard, "qui consiste à se détourner de tout ce qui peut occuper le cœur et détourner de l’invocation de Dieu".
Puis la maîtrise de la langue : "la langue doit s’abstenir de divaguer, mentir, médire, diffamer, dire des grossièretés, faire du tort et prendre partie. Elle doit se taire et s’occuper à invoquer Dieu".
Puis la maîtrise de l’ouïe : « l’ouïe doit s’abstenir de tout ce qui est répréhensible : le médisant et celui qui écoute sont associés… ».
Puis la maîtrise du corps : ne pas montrer que l’on jeûne par une attitude fatiguée, mais aussi…"ne pas trop dormir pendant la journée afin de ressentir la faim et la soif et l’affaiblissement des forces. Le cœur deviendra alors plus pur... »
Puis, très important : la modération dans le repas de rupture du jeûne, à la nuit tombée : « quel est l’intérêt du jeûne… si le jeûneur lors de la rupture pallie à ce qu’il a raté dans la journée en ajoutant même d’autres sortes de nourriture ?... Il est connu que l’objectif du Ramadan est de vider l’estomac et de briser le désir pour que l’âme s’affermisse. Si on laisse l’estomac vide du matin au soir, qu’on laisse ses envies et désirs s’exacerber et qu’ensuite on le nourrisse de douceurs, son plaisir augmentera et des désirs naîtront qui seraient restés endormis ».
Pour tirer profit du jeûne, « on ne doit manger que ce qu’on mangeait le soir hors de la période du jeûne ».
Enfin, la dernière vertu du jeûneur est l’humilité. « Après la rupture du jeûne, le cœur doit être inquiet et balançant entre la crainte et la supplication. On ne sait si son jeûne est accepté par Dieu…. Qu’il en soit ainsi chaque fois qu’on accomplit un acte de dévotion » !
A ces conditions, le jeûneur a deux joies : lorsqu’il rompt son jeûne, il se réjouit, et lorsqu’il rencontre Son Seigneur, il se réjouit d’avoir jeûné !
Mais, comme nous le dit Djalâl-od-Dîn Rûmî, ces joies sont encore une aube...
« Quand l’aube de l’amour divin commence à se lever
L’âme, dans le corps des vivants, prend son vol
L’homme arrive à cet état où, à chaque souffle,
Sans se servir de ses yeux, il parvient à voir l’Ami. »
Ibn ’Arabi écrit à propos du rôle du jeûne librement pratiqué dans la voie initiatique :
"L’être réalisé ne s’impose pas de lui-même un régime de faim, mais d’une façon naturelle sa nutrition décroît lorsqu’il se trouve dans la condition de l’Intimité divine."
Le ramadan : un mois de piété dédié à la Révélation
9 septembre 2007, par abd al haqq
Ramadan
Ai-je assez jeûné de Toi ö l’Unique ? Ai- je assez palpé le vide de mon cœur et de mon esprit ? Ai-je assez de place en moi pour Ton amour ? Voici que je me tiens là, en attente. Comme la plante assoiffée, prisonnière du sol sec, attend la pluie bienfaisante. Vers le sol se ploient mes rameaux, vers le ciel se tourne mon espoir. Viendras-Tu Ô Aimé ? Viendras tu m’abreuver de l’eau pure de Ton regard ? J’attendrai tout le jour Ta venue. Rien d’autre que Toi n’entrera en mon âme affamée de Ta seule présence. Tu seras là pour la joie et, même si je ne le sais pas encore, c’est Toi qui porteras l’air de chacun de mes souffles… Ainsi mes yeux jeûnent en absence de Ta lumière. Même les ténèbres ne sont que la trace du soleil de Ta présence et le vide de mon âme est l’empreinte de Ta venue proche.
"La prière donne la conviction extérieure en vous faisant pénétrer le monde matériel par la cohésion de toutes vos facultés avec les substances élémentaires ; elle donne la conviction intérieure en développant votre essence et la mêlant à celle des mondes spirituels.
Pour parvenir à prier ainsi, obtenez un entier dépouillement de la chair.
Acquérez au feu des creusets de la pureté du diamant, car cette complète communication ne s’obtient que par le repos absolu, par l’apaisement de toutes les tempêtes.
Oui, la prière, véritable aspiration de l’âme entièrement séparée du corps, emporte toutes les forces et les applique à la constante et persévérante union du visible et de l’invisible.
En possédant la faculté de prier sans lassitude, avec amour, avec force, avec certitude, avec intelligence, votre nature spiritualisée est bientôt investie de la puissance.
Comme un vent impétueux ou comme la foudre, elle traverse tout et participe au pouvoir de Dieu. Vous avez l’agilité de l’esprit ; en un instant, vous vous rendez présent dans toutes les régions, vous êtes transporté comme la Parole même d’un bout du monde à l’autre.
Il est une harmonie, et vous y participez !
il est une lumière, et vous la voyez !
il est une mélodie, et son accord est en vous.
En cet état, vous sentirez votre intelligence se développer, grandir, et sa vue atteindre à des distances prodigieuses : il n’est en effet ni temps, ni lieu pour l’esprit.
L’espace et la durée sont des proportions créées pour la matière, l’esprit et la matière n’ont rien de commun.
Quoique ces choses s’opèrent dans le calme et le silence, sans agitation, sans mouvement extérieur ; néanmoins tout est action dans la prière, mais action vive, dépouillée de toute substantialité, et réduite à être, comme le mouvement des mondes, une force invisible et pure.
Elle descend partout comme la lumière, et donne la vie aux âmes qui se trouvent sous ses rayons, comme la nature est sous le soleil.
Elle ressuscite partout la vertu, purifie et sanctifie tous les actes, peuple la solitude, donne un avant-goût des délices éternelles.
Une fois que vous avez éprouvé les délices de l’ivresse divine engendrée par vos travaux intérieurs, alors tout est dit !
Une fois que vous tenez le sistre sur lequel on chante Dieu, vous ne le quittez plus".
Le ramadan : un mois de piété dédié à la Révélation
19 juin 2015, par CV
J’ai une question à Bayazid : Est-ce qu’un pseudo Catholique monarchiste Balzacien Hindouisant comme moi peut jeûner avec les Mahométans pendant le Ramadan ? Je viens seulement de découvrir cette citation de Balzac sur la prière ! Balzac était véritablement un être de génie, ses mots sur la prière méritent d’être médités. Connaissez vous la description que fait Théophile Gautier de l’écrivain dans sa galerie de portraits critiques ? Si les yeux sont la fenêtre de l’âme, alors quelle âme ! Cela m’évoque lorsque RB parlait des yeux de Maha :
« "Quant » aux yeux, il n’en exista jamais de pareils ; Ils avaient une vie, une lumière, un magnétisme inconcevables. Malgré les veilles de chaque nuit, la sclérotique en était pure, limpide, bleuâtre, comme celle d’un enfant ou d’une vierge, et enchâssait deux diamants noirs qu’éclairaient par instant de riches reflets d’or ; c’étaient des yeux à faire baisser la prunelle aux aigles, à lire à travers les murs et les poitrines, à foudroyer une bête fauve furieuse,des yeux de souverain, de voyant, de dompteur.
Ces yeux extraordinaires dès qu’on avait rencontré leur regard, empêchaient de remarquer ce que les autres traits pouvaient présenter de trivial ou d’irrégulier.
L’expression de la figure était une sorte d’hilarité puissante, de joie rabelaisienne et monacale- le froc contribuait sans doute à faire naître cette idée- qui vous faisaient penser à un frère Jean des Entommeurs, mais agrandi et relevé par un esprit de premier ordre.« " »
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Le ramadan : un mois de piété dédié à la Révélation
22 juin 2015, par CV
Alors j’’y arrive pas ! Mais c’est social. Les Musulmans doivent avoir le soutien de la Ummat. Hier j’étais avec des amis dans un Kebab à Paris. J’ai craqué devant un cousscous végétarien ( quand même). Puis est venu nous rejoindre un autre ami de notre groupe. Il est musulman. Lui est resté devant son assiette vide à nous regarder en souriant. J’ai pensé à Bayazid et je me suis trouvé un peu idiot.....
Le ramadan : un mois de piété dédié à la Révélation
23 juin 2015, par Bayazid
Cher CV : ne vous trouvez pas idiot. Il y a certainement des domaines de la foi qui vous donnent l’envie et la capacité d’imposer à votre corps une discipline inhabituelle !
Le ramadan : un mois de piété dédié à la Révélation
1er juillet 2015, par CV
Bonne pioche Bayazid ! Cela me prend environ 11 heures par semaine. Mais cela devrait favoriser un suivi du jeûne Musulman cependant je me rends compte qu’une tradition vous prend et vous fait faire les choses que vous ne pourriez faire autrement. Si je devenais Musulman j’y arriverais sans problème. Quand je suis en Inde je n’ai pratiquement pas besoin de manger à cause de la chaleur on a moins faim certes mais c’est parce qu’il y a une autre alimentation. Je crois que nous allons un jour comprendre que le nombril reste du cordon qui nous alimentait dans la vie intra-utérine est relié aux nadis ou méridiens dans tout le corps, c’est notre bouche prânique.