Pèlerinage à
Compostelle par le Camino del Ebro |
Etape 27 : De Mansilla las Mulas à Leon Camino del Ebro : 716 km déjà parcourus par El Peregrino |
Je suis attablé dans un bar confortable juste en face de la très belle cathédrale de Léon. L’endroit m’offre une vue sur la grande place piétonne du parvis, c’est dimanche, jour de fête et il y a du monde partout. Dehors, de temps en temps, il tombe quelques gouttes, mais dans l’ensemble le soleil est gagnant. Je suis devant mon café crème et je demande au garçon si je peux rester ici un moment pour écrire : « Le temps qu’il vous plaira » me dit-il... ! Une petite étape aujourd’hui, nous restons à une altitude de 800 mètres que nous gardons depuis plusieurs jours, depuis l’étape 18 de Santo Domingo de la Calzada pour être très exact. J’ai 18 km à faire, presque une balade et tout le temps de traîner en arrivant dans cette grande ville de Leon 140 000 habitants. Le temps passe vite, les kilomètres semblent plus courts que d’habitude, c’est la distraction de traverser plusieurs villages dans la matinée qui donne cette impression. À 6 km de Mansilla, il y a le Puente de Villarente qui franchit le Rio Porma avec 20 arches spectaculaires et juste après à ma gauche se dresse la porte de l’ancien hôpital pour pèlerins. J’arrive très tôt à Léon, il est midi environ. Une déconvenue m’attend, je ne pourrai pas coucher au couvent des sœurs Bénédictines de Santa Maria de Carvajal. Le refuge est fermé pour décontamination... ! Cette année il y a un problème de punaises paraît-il dans les albergues du Camino... ! J’ai déjà rencontré, il y a quelques jours, des pèlerins qui m’en ont parlé. Certains avaient des auréoles rouges sur les bras qu’il faut traiter avec des pommades à base de corticoïdes... Je ne connais pas ces inconvénients, déjà quand j’étais à l’armée, il y a longtemps, les punaises et les moustiques m’ont toujours laissé dormir tranquillement. Je me retrouve donc dans le refuge municipal, très fonctionnel certes, mais situé un peu loin du centre-ville et c’est dommage... Après mon installation dans une chambre confortable de huit lits et une douche bien chaude, je me sens d’attaque pour marcher à nouveau à travers la ville. Mes amis les deux Espagnols partagent ma chambre. Il y a aussi Michel un gersois de Fleurance avec qui je sympathise aussi beaucoup : petit, cheveux blancs, un peu rondouillard, mais qui marche beaucoup plus vite que moi. Tous les quatre nous allons nous côtoyer quelques jours et souvent rire et nous émouvoir autour d’une table, mais le camino nous réserve encore des surprises... Il me faudra une bonne demi-heure pour atteindre le centre historique, mais il me faudrait plusieurs jours de déambulation pour visiter une telle ville... Je suis donc devant la cathédrale gothique de Santa Maria de la Regla qui mérite elle aussi le déplacement. C’est un jour de fête et certains quartiers défilent dans la ville avec des oriflammes du plus bel effet devant l’édifice religieux. Il y a de la joie dans l’air, le temps est favorable, les repas festifs semblent avoir été bien accompagnés sûrement d’un Rioja bien gouleyant... Le ciel est encore menaçant, j’espère qu’il le restera. J’ai une demi-heure de marche pour revenir au refuge. Je fais une halte dans un bar pour voir aussi nombre d’Espagnols devant la télévision qui suivent Alonso dans sa formule 1 ... C’est un jour important pour eux et les commentaires folkloriques sont plus intéressants que le spectacle sur le circuit ... Nous avons trouvé pour ce dimanche, mais avec difficulté, un restaurant qui nous permet de dîner vers vingt heures. Pour huit euros et une bouteille de Rioja que veut nous offrir le boxeur sentimental, nous allons passer un bon moment comme je les aime sur le Camino... Une histoire d’hommes ordinaires, mais c’est aussi pour ça que nous sommes tous sur le chemin... C’est ce mélange un peu schizophrène entre les moments de solitude de la journée et ce besoin de fraternelles amitiés du soir... C’est aussi la pensée qui me vient d’un couple idéal qui saurait quand l’autre a besoin de traverser l’un ou l’autre de ces moments... ! Fusion idéale à vivre, c’est peut-être la recherche intime de tous les hommes et des femmes... Dehors, il pleut beaucoup pendant ce repas, mais nous arrivons à regagner l’auberge sans être trop mouillés. J’ai un peu froid, je tremble nerveusement. Quand je me glisse dans mon duvet, j’ai l’impression de rentrer dans un œuf... ! Peut-être un désir de renaissance pour une autre vie qui aurait été possible, une autre destinée, une rencontre qui ne fut pas tardive... Pourtant ma vie a été belle, elle l’est et elle sera sûrement encore pleine de surprises à venir... |
– Le logo de l’article est une photo de Jean-Charles Rey. Nous le remercions de nous avoir autorisé à la publier.
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