Elie tient une place de premier plan notamment dans les Evangiles, et cette place est presque toujours liée à Jean le Baptiste. Les premiers Chrétiens étaient Juifs, ils attendaient donc le Messie, précédé, nous l’avons vu par Elie. L’ayant reconnu en Jésus, le Christ, ils identifièrent logiquement Jean le Baptiste à Elie. On trouvera des échos de cette croyance dans les Evangiles. (cf. Marc 9, 11 Transfiguration)
De même, lorsque les Juifs envoient une délégation vers Jean le Baptiste, ils lui posent cette question : "Es-tu Elie ?" (Jean 1, 19 à 21). Dans l’entourage du roi Hérode, au récit des prodiges réalisés par Jésus, on se demande si c’est Jean le Baptiste revenu d’entre les morts, car entre temps il avait été décapité, ou s’il s’agit d’Elie.
On
remarquera que, dans les Evangiles, la personne de Jean le Baptiste n’a de raison d’être qu’en fonction d’Elie, et ceci dès sa conception, puisque l’ange qui annonce à Zacharie la venue de son petit Jean, lui déclare "qu’il sera revêtu de l’esprit d’Elie". En clair cela signifie que le même esprit, venu de Dieu, qui animait Elie, animera Jean le Baptiste.
Il se produit là un exemple assez typique de ce que dans la tradition Bouddhiste l’on nommerait un "tulcu". C’est ce phénomène qui préside à de grandes lignées spirituelles comme celle des Dalaï Lamas, et que quelques occidentaux assimilent à tort à la notion de "réincarnation".
Trente années après cette Annonciation et cette naissance, Jean le Baptiste prêche sur les bords du Jourdain. Tout dans ses manières rappelle le Maître Elie : le même manteau en poils de chameau et, détail important ; le même pagne de peau autour des reins. Comme son maître, Jean le Baptiste, il prêche dans le désert, et comme lui, il dit qu’il vient de la part d’un Autre beaucoup plus grand devant lequel il doit s’effacer. Tout comme Elie, à qui il fut imparti d’oindre les rois d’Israël, Jean va oindre le Roi des Rois. La cérémonie d’onction d’un roi, dite "sacre du roi", qui consiste à rendre la personne du souverain sacrée, est une initiation. C’est même dans l’ordre initiatique chevaleresque, le degré suprême de l’initiation.
Lorsque, dans les évangiles, Jésus parle au sujet de Jean, c’est également toujours dans cette perspective éliaque [2]. (cf : Mat 11, 7 à 10 ou 11, 13 à 15 : "Il est cet Elie." ) ou encore lors de la Transfiguration.
Cette péricope [3], la Transfiguration, qui à elle seule mériterait un chapitre particulier, va retenir notre attention :
Souvenez-vous, Jésus part seul dans la montagne avec trois de ses disciples : Pierre, Jacques et Jean l’Evangéliste. Il entre en prière et, d’un seul coup, il est transfiguré, c’est-à-dire qu’il devient radieux de lumière. A ce moment apparaissent Moïse et Elie conversant avec lui et enfin une voix venu du ciel affirme : "Celui-ci est mon fils bien aimé".
Que faut-il retenir de cette scène ?
– Qu’elle rappelle étrangement la théophanie du Sinaï, où Dieu se révèle à Moïse et que par là elle valide l’identité de Jésus.
– Que les témoins présents seront les pères fondateurs de trois lignées Initiatiques ; Pierre, l’Eglise catholique ; Jacques, la lignée des métiers ; quant à Jean c’est dans certains ordres initiatiques que nous le retrouvons [4].
Moïse et Elie représentant, nous l’avons vu, deux "chapelles" différentes du culte Juif se trouvent ici réunis ; cela signifie que la totalité, la complétude de la Tradition se trouve présente dans la personne du Christ.
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